Interview de Kerlaft le rôliste lors du Japan Touch Haru/Geek Touch 2017

Lors du Japan Touch Haru

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Lors du Japan Touch Haru/Geek Touch 2017, nous avons pu interviewer du beau monde dont Kerlaft le rôliste, l’ambassadeur du jeu de rôle en France.

Au milieu de cette horde de stands de figurines et de goodies en tout genre, de Geek et d’Otaku, de Fantasy et de Science-Fiction et de jeux vidéos et de cartons se dressait un stand atypique, rempli de fiole en tout genre emplie de magie et de mystère. Sous le doux nom de bave de limaces, de potions de vie et même du Nuka Cola, un univers sans aucune limite s’offre au visiteur un peu curieux. Mais le plus intéressant, c’était surtout le propriétaire de ce présentoir fantaisiste, un magicien bien connu des rôlistes qui se nomme Kerlaft.

Pause Geek : Bonjour Kerlaft, comment avez-vous débuté dans le jeu de rôle ?

Kerlaft : Alors, j’ai débuté en 1981 sur une plage en Afrique. Il y avait le grand frère d’un pote qui revenait d’une université aux États-Unis et qui était en train de jouer à un jeu bizarre. Ça parlait de dragon, de magicien, de boule de feu… Et on s’était mis à côté, on s’était mis sur la gueule avec des bambous pendant tout le temps qu’il parlait de ça puis à la fin il a eu pitié de nous et il nous a fait jouer à une partie de Donjons et Dragons. Et depuis ma vie n’a plus été la même. Ça a été ma première fois.

À l’époque le jeu de rôle été assez mal vu…

Alors c’était très bien vu. Tout le monde en faisait, on en trouvait dans les supermarchés. Ce n’est qu’après, dans la suite des années 80 que ça s’est diabolisé. Un petit peu comme il avait fait à l’époque avec le Rock’n’roll et pour d’autres choses et les médias ont joué le coup y compris Mireille Dumas et Famille de France, c’était terrible. J’ai perdu même un boulot à l’époque à cause de ça.

Ah ouais carrément ? Vous travailliez dans le milieu du jeu ?

Non c’était simplement que j’avais mis dans mon CV que je faisais du jeu de rôle, ça s’est su, j’étais à l’époque dans le milieu bancaire et on m’a remercié suite à cette découverte.

Ah oui c’est aller loin.

C’est aller très très loin à l’époque.

Du coup ma question c’était quel était l’impact de ses préjugés sur les rôlistes ?

Il y en a eu beaucoup et là on prend notre revanche. Tout comme ceux qui regardaient Star Wars ou les gens qui étaient considérés comme des Geeks, c’était le vilain boutonneux, la personne à montrer du doigt à laquelle on ne veut pas ressembler. Et là maintenant il y a une vraie revanche là-dessus et c’est pour ça d’ailleurs que j’ai créé mon personnage et toutes les différentes actions qui sont autour pour aider à réhabiliter justement ce jeu de rôle.

Donc le marché à chuter suite à cette chasse aux sorcières

Oui beaucoup de gens à l’époque se sont mis à arrêter de jouer, ils ont eu peur de jouer, certains continuaient de jouer en cachette, d’autres continuaient à éditer, d’autres jouaient dans la provoc. Je prends le cas d’In Nomine Satanis, pour des jeux de rôle un petit peu à sensation. C’était une mauvaise époque pour ça et petit à petit on a regrapillé un petit peu, on a expliqué un peu mieux aux gens, ils ont arrêté un petit peu d’être des moutons par rapport à ça et ça à bien avancé.

Grâce à internet notamment je pense ?

Grâce à internet, mais grâce aussi au combat de chacun. Puis aujourd’hui ça devient vraiment IN. Vous avez énormément de stars qui font un petit peu leur coming-out rôliste en quelque sorte. Vous avez quelqu’un comme Maxime Chattam qui a expliqué qu’il tirait certaines de ses histoires de scénario qu’il a fait avec des amis. Des hommes politiques qui se targuaient d’être rôliste parce que maintenant c’est bien de pouvoir l’affirmer haut et fort. On a plus honte.

En 2017, comment devient-on rôliste ? Parce qu’il y a eu une sorte d’extinction de masse, du coup on n’arrive pas forcément à savoir comment on se lance, avec quel jeu, à trouver du monde…

C’est tellement simple aujourd’hui. Vous avez plusieurs boutiques qui font régulièrement des initiations. Comme ici à Lyon à Trollune notamment, je crois que c’est un ou deux mercredis soir par mois. J’ai également conçu le GPS Rôliste à télécharger sur mon site www.kerlaft.com, c’est gratuit. Choisissez l’onglet GPS et petit à petit on développe ça, département par département. Mais déjà sur le 69 et l’Isère vous avez des documents à télécharger et à imprimer sur lequel vous avez tous les clubs, associations, tous les endroits à potentiel rôliste où vous pouvez trouver une table, un MJ, du matériel, et il y a énormément de matos d’initiation. Donc si vous n’avez jamais joué avant, il y en a un qui peut s’y coller, mais l’idéal c’est de s’inviter à une partie et de découvrir ça. Par contre, une fois que vous avez essayé vous êtes cuit.

Quel conseil vous donneriez à un rôliste débutant ?

Les conseils c’est déjà de ne pas avoir peur, de ne pas se prendre la tête. Il y a des règles, mais on s’en fout. On est là pour s’amuser avant tout. Faut pas se prendre la tête, faut pas s’imaginer que l’on sera jugé, c’est juste comme une bonne partie de jeu de société avec des copains. On est là pour s’éclater. C’est vraiment énorme, vous avez pas mal de produits d’initiation aujourd’hui comme « Chroniques oubliées », comme « Aventury », j’en passe et des meilleurs. Vous avez tellement de choses sympathiques. Il suffit de demander dans l’une des boutiques rôlistes de votre région, parce qu’il y en a forcément une, deux, trois et ils sauront vous conseillez. Il y a énormément de clubs de jeu de rôle qui sont ouverts, virtuel même. On peut même jouer par correspondance par internet par le biais de Roll20 ou d’autres logiciels comme ça. Le plus simple c’est de vous inviter à une partie. Faites-en plusieurs même. Découvrez votre style. Il n’y a pas que Donjons et Dragons, il y a D&D bien sûr, ça, c’est obligatoire, mais il y a plein d’autres choses. Il y a des choses plus adultes, plus enfantines, des choses modernes… C’est aussi vaste que la télévision, le cinéma ou les romans. Puis si vous hésitez, vous me contactez par n’importe quel moyen. Moi je vous guiderais.

Tous les mondes sont représentés, tous les univers. Tu as cette immersion où tu vas prendre la place du personnage, tu vas décrire chacune de ses actions et ça va conduire à des situations plus ou moins cocasses et c’est toi qui vas faire vivre ton personnage à l’instar d’un film où l’acteur à un script. Tu n’as pas de script. Le seul qui a le script c’est le Maître du jeu. Et c’est lui qui va prendre tour à tour le rôle des différents personnages que tu vas rencontrer. Et tu vas parler pour ton personnage. Et tu vas te marrer, ça, c’est certain. Tu vas vibrer, tu vas t’éclater et c’est vraiment trop énorme.

Et comment devient-on Maître du jeu ?

Généralement tu t’achètes ou tu te fais prêter un bouquin de jeu de rôle, tu le potasses un petit peu et tu te lances. Soit tu prends un scénario tout fait. Là il y a des scénarios aujourd’hui où comme à l’époque tu as des petits encarts à lire quand ils arrivent à un certain endroit pour tes personnages. Et à eux de se débrouiller. Ça m’est même arrivé de ne pas maîtriser des règles et de faire jouer un joueur à ma table qui lui connaissait les règles et qui me guidait. Mais la partie aventure tu peux la faire. Privilégie un monde que tu connais et joue dedans. Il y a également des systèmes génériques pour créer ton propre jeu de rôle. Je n’aime pas trop les systèmes sur Fallout, mais en tant que MJ à Fallout RPG on a fait notre petit mix avec des systèmes génériques et ont s’éclatent. C’est trash, mais ont s’éclatent.

En tout cas on sent que vous avez une vraie passion pour le jeu de rôle. De par cet échange, mais également via vos actions sur internet et en salon.

Oui c’est vrai. D’un côté ce n’est pas qu’une frustration puisque c’est vrai que j’en ai souffert à cette époque d’être montré du doigt même par mes propres parents qui avaient peur pour moi. Ils auraient presque préféré à un moment que je me drogue plutôt que je joue aux jeux de rôle. Mais c’est quelque chose qui m’a apporté tellement dans ma vie au niveau personnel. Pouvoir m’exprimer en public, avoir cette faculté à pouvoir imaginer les choses, de les organiser. Au niveau social également, j’étais quelqu’un de très très renfermé. Ça m’a apporté tellement qu’en 2013 j’ai créé ce personnage de Kerlaft le rôliste avec ses sites, avec toutes ses activités, ses actions et j’avais vraiment envie de rendre aux gens, de rendre aux jeux. Un petit peu autour de moi ce que m’a apporté le jeu de rôle ! Et c’est pour ça que j’ai vraiment plaisir à faire découvrir, à aider des jeunes artistes. D’ailleurs le site est en libre-service pour toute personne qui le souhaite. Il suffit de me demander un accès et vous aurez un accès en tant qu’auteur. Vous êtes auteur de votre propre article. Vous pouvez faire de la communication et rencontrez la communauté rôliste. Sur le site il y a entre 2000 et 4000 clics par mois dessus de personne qui sont fans. Chaque article ensuite est dispatché sur Facebook, sur Twitter et sur Google+ et vous allez vraiment pouvoir rencontrer du monde, voir des gens qui sont passionnés. Alors forcément vous allez avoir des trolls de partout, vous aurez des puristes, vous aurez même des couillons parce qu’il y en a de partout, mais en général c’est un monde tellement ouvert, tellement agréable et vous allez forcément vous y éclater.

D’ailleurs qu’apporte le jeu de rôle dans la vie privée ?

Ça aide déjà à se faire des amis. J’ai plein d’amis et je ne parle pas juste de connaissance Facebook. J’ai rencontré tellement de gens et quand on arrive à partager cette espèce de vie rêver autour d’une table, ensemble on vit des aventures tellement extraordinaires, ça crée des liens. C’est aussi le moment pour se réunir et faire une bonne bouffe. Ça m’a apporté beaucoup au niveau social, ça m’a apporté également beaucoup au niveau personnel parce qu’au niveau du développement il y a énormément d’articles qui ont été écrits là-dessus, mais au niveau développement personnel ça va vous donner beaucoup plus d’assurance. Ça va vous réapprendre aussi les notions de contrat social. C’est important et ça va vous apprendre à vous éclater puis à vous échapper sans perdre pied avec la réalité justement. Et ça vous fait cette petite bouffée d’air pur quand le monde est trop triste, trop chiant autour de vous. Tout le monde a peur, tout le monde fait grise mine, on en a marre au niveau du pognon et puis franchement c’est l’un des loisirs qui coûte le moins cher au monde. Une fois que vous avez votre paire de dés, que vous avez un bouquin de règle, un crayon, une feuille de papier, vous en avez pour toute une vie. Et là vous ne pouvez pas le voir sur mes paroles, mais mon premier bouquin que j’ai eu en 1982/1983, je joue encore avec. Et il me permet de faire vivre des aventures merveilleuses que je vis maintenant avec mes propres enfants. C’est vraiment énorme. Et je vous invite à essayer. Si vous avez un doute, contactez-moi. Si vous n’avez pas confiance en vous, mais lancez-vous, on est là pour s’éclater. Choisissez des bons amis autour de vous et faite vous ce délire entre potes c’est trop génial.

Vous l’aurez compris en lisant cette interview, Kerlaft est quelqu’un de vraiment passionné par le jeu de rôle. C’est également la meilleure rencontre que nous ayons faite lors de cette édition du Geek Touch. Le seul regret que j’ai, c’est de ne pas avoir eu idée de lui faire dédicacer mon jeu de rôle « Chronique oubliées » que je venais de lui acheter. Une prochaine fois peut-être !

Pour soutenir Kerlaft, je vous invite à le suivre sur son site internet www.kerlaft.com, sur sa page Facebook et sur sa page Tipee.


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